Les refuges

Pirouette youyou du sénégal

 

La décision de tenir un refuge doit être mûrement réfléchie. Dans le milieu aviaire, il faut apprendre assez rapidement à cacher ses sentiments, c’est le seul moyen d’aider les perroquets et de survivre.

La vraie et seule mission d’un refuge est d’améliorer la vie des perroquets, que ce soit par la sensibilisation, l’éducation, l’accueil ou le replacement de ceux-ci. Plusieurs personnes s’affichent gestionnaires de refuge, mais chacun décide du mode de fonctionnement de son établissement.

Je commencerai par analyser les raisons pour lesquelles les perroquets sont abandonnés, pour passer à ce que l’on peut faire pour éviter l’abandon de ces oiseaux ou pour aider ceux-ci à avoir une meilleure vie dans le futur.

Il est clair que les animaux de compagnie sont souvent traités comme un bien ou une marchandise, et non comme les êtres vivants qu’ils sont. Nos attentes envers eux sont grandes…trop grandes! Pourquoi? Et bien, nous faisons tous partie du problème :

  • Les fiches descriptives sur Internet sont faites par des éleveurs. Comme la grande majorité des éleveurs vivent avec des couples reproducteurs ou des bébés, leurs fiches sont loin d’être représentatives. Par exemple, si vous comparez votre youyou du Sénégal aux fiches trouvées sur internet, vous verrez à quel point votre oiseau est différent de la description qu’on en fait. Or, le youyou est un des perroquets les plus souvent abandonnés.
  • Les gens rencontrent une connaissance qui cohabite avec un oiseau avec lequel elle a une belle relation… Ils ne voient pas le travail derrière cette relation et espèrent la même complicité.
  • Sur Youtube, on trouve facilement des vidéos faites par des maîtres qui veulent montrer les talents de leur compagnon. N’est-ce pas qu’ils sont mignons et parfaits? Les vidéos d’oiseaux qui mordent, attaquent et détruisent sont nettement plus rares. Et c’est dommage!
  • Les animaleries sont là pour vendre, et le roulement du personnel fait que les connaissances de leurs employés sont limitées. La vente est poussée au détriment du bien-être des animaux. Peut-on blâmer les propriétaires d’animaleries? Ils obéissent à la loi de l’offre et la demande

La solution, c’est l’éducation, peu importe l’espèce.

Un des devoirs des refuges est d’éviter les abandons. Pour remplir cette mission, les gestionnaires de refuge doivent partager leurs connaissances. La diffusion des connaissances peut passer par l’écrit, les forums, les séances de formation et l’aide individuelle.

Lorsqu’une demande d’abandon est faite, il faut explorer toutes les solutions possibles avec le propriétaire de l’oiseau afin d’éviter que l’oiseau soit laissé au refuge. Si ce n’est pas possible, il faut analyser la situation.

Chaque refuge a ses forces et ses faiblesses, et il importe de savoir les reconnaître. Ainsi quand il est préférable de ne pas accueillir un oiseau donné par manque d’espace, de connaissances ou de compatibilité, le gestionnaire du refuge devrait être capable d’aider le propriétaire à trouver une autre ressource. Les choix sont limités; il faut donc prendre des décisions difficiles afin de survivre et de pouvoir continuer à offrir de l’aide.

Si la plupart des refuges n’acceptent plus les oiseaux de petite taille, c’est pour une raison bien simple : ceux qui acceptent les petits perroquets sont vite dépassés par leur nombre. Il serait pourtant facile pour le propriétaire de placer cet oiseau dans leur entourage et de garder un œil dessus pour s’assurer de son bien-être.

Le refuge est un service de dernier recours et ne devrait pas servir à décharger les propriétaires de leurs responsabilités.

Garder la tête hors de l’eau est loin d’être facile pour les refuges privés, et les donateurs sont rares. Certains gestionnaires de refuge peuvent compter sur des connaissances qui les connaissent bien et qui respectent et soutiennent leur travail. Quelques éleveurs offrent leur soutien d’une façon ou d’une autre. Comme ils contribuent au problème, c’est pour eux une bonne façon de participer au bien-être des petits rescapés. Cette aide allège le fardeau des refuges et permet de réserver des fonds en cas d’urgence vétérinaire. Certains hésitent toutefois à accepter cette aide pour des raisons morales; chacun a sa façon de voir au bien-être de ses protégés. Cependant, il n’y a aucun mérite à priver les oiseaux de soins pour des convictions qui ne reposent que sur un orgueil mal placé.

Avoir plusieurs oiseaux augmente le risque de contamination. Afin de réduire les risques, on effectue le dépistage des principales maladies aviaires dans certains refuges. L’arrivée de chaque oiseau se traduit donc par des frais d’environ 250 $. Le dépistage des maladies et la quarantaine ne permettent pas d’éliminer complètement le risque, mais durant cette période (de soixante jours), l’oiseau est plus stressé et certaines maladies opportunistes en profitent pour se manifester.

Vient ensuite le travail de rééducation : certains oiseaux retrouveront un comportement acceptable et pourront éventuellement trouver une bonne famille. Il s’agit d’un travail ardu, qui peut prendre plusieurs mois, voire quelques années! Il ne faut jamais oublier que dans un refuge, les perroquets ont l’avantage d’être nombreux et qu’ils peuvent réapprendre à se comporter en oiseaux et tisser des liens entre eux; avec le temps, ils ont moins besoin d’avoir une relation quasi fusionnelle avec un humain…

Si un oiseau est placé dans une nouvelle famille, le gestionnaire du refuge demeure responsable de son suivi. Avant toute chose, il doit bien connaître la future famille d’adoption et s’assurer que l’oiseau y restera durant plusieurs années. Il doit faire signer un contrat à l’adoptant pour protéger les droits de l’oiseau et responsabiliser l’adoptant.

Plusieurs gestionnaires de refuge ont beaucoup de mal à laisser partir leurs protégés pour d’excellentes raisons : leur but est d’offrir la stabilité à l’oiseau. Or, ils savent que, même après avoir pris le temps de chercher un bon éleveur, de préparer l’arrivée de l’oiseau, de lui choisir un nom, d’acheter et d’aménager une belle grande cage, et de consulter ensuite des forums, certaines personnes finissent quand même par revendre leur oiseau après quelques semaines à peine lorsque la réalité ne correspond pas à leurs attentes. Quand en plus l’oiseau n’a rien ou presque rien coûté, il est encore plus facile de s’en départir.

Comme vous pouvez le constater, la gestion d’un refuge est loin d’être simple. Il faut avoir une volonté à toute épreuve pour réussir à aider au mieux les perroquets.

Chaque administrateur de refuge a ses propres valeurs, l’important pour celui qui veut lui céder son oiseau ou en adopter un, c’est que ces valeurs lui conviennent. Vous choisissez en fonction de vos attentes et le refuge est libre de les accepter ou non. Sachez tout de même qu’après avoir signé un contrat de cession, vous n’aurez plus de droit de regard sur votre oiseau (à moins d’avoir passé une autre entente avec le refuge). Par ailleurs, adopter un perroquet d’un refuge est une grande responsabilité, pas parce que cet oiseau a des problèmes de comportement, mais parce que les humains l’ont déjà trahi à plusieurs reprises : vous devrez prouver à votre nouvel oiseau qu’il pourra compter sur vous durant les années à venir!

 
Marie-Josée Ouellet
(Révisé le 27 janvier 2015)